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4 juin 2015

I see no sign of fortress

Je lis un article sur le PTSD, encore. Enfin, je suis obligée de le lire, vu que c'est pour les cours. Je lis un cas clinique, auquel je me rapproche énormément - la violence, la personne est immobilisée, ne peut rien faire, se sent impuissante. Ne se rappelle pas de l'incident, se rappelle juste de ses propres actions, ses cris, ses pleurs, ses sensations internes.
Je sens mes yeux qui s'embuent, je sens que mon coeur se rétrécit à une vitesse éclair, je sens que je tremble, partout, à l'intérieur de mon corps, mais je suis rassurée, je suis dans un coin isolé de la BU, loin de tout le monde, personne ne peut me voir.
Je commence à pleurer - mais je ne le veux pas. Je crois que c'est mon cerveau qui pleure. Moi, je comprends pas pourquoi j'en fais tout un plat, je vais bien, tout va bien dans ma vie (vraiment, pour une fois). 
Et je commence à ne plus pouvoir respirer. Enfin, si, je respire toujours, mais tellement moins. Mon coeur me fait extrêment mal, au sens propre. J'ai l'impression qu'il va lâcher. Je suis bloquée cognitivement. Je pense à rien, je ne sais pas ce qu'il se passe dans mon cerveau, ni dans mes pensées, moi qui ait toujours 6544165 idées à la fois, je me retrouve incapable de lister quoi que ce soit. J'ai un intense mal de tête qui arrive. Après des secondes de flottement, je me rends compte que je respirais plus. J'inspire, une grande bouffée d'air. J'ai la nausée qui arrive, je veux également aller aux toilettes soudainement, comme si j'allais me pisser dessus.
Je continue de pleurer, même si je ne sais pas pourquoi. 
Je revois des flashs. 
Dans ma tête, une image très claire apparaît. A savoir un jour où j'ai croisé mon père par hasard, à Montpellier. J'ai ressenti exactement ces mêmes sensations physiques. J'ai changé de chemin -- j'arrive toujours en retard de toute façon. Je pleure à grand débit dans la rue, sans aucune raison. Sans pouvoir m'arrêter. Je panique, mon souffle s'arrête, je m'arrête le long du boulevard du jeu de paume, dans une petite rue, je m'assied sur des marches, et j'enfonce ma tête dans mes genoux, et je continue de pleurer, mais en silence. Je me sens nulle et détestable d'un coup, alors que j'allais bien trois secondes avant. Je mets ça sur le compte de ma dépression, et de mon incapacité à ressentir des émotions positives. Je me déteste. Je me déteste d'aller mal, putain. Je me déteste de sentir la fin de mes doigts en filigrane, parce que des fourmis s'emparent de tout mon corps. Je me déteste de ne pas savoir faire face au stress. Je me déteste, parce que mon père, on s'est confrontés physiquement, pas mal de fois. Et au fond, c'est moi qui ait gagné. Mais c'est moi qui change de trottoir. C'est moi qui pleure. C'est moi qui l'évite. 
Je sèche mes larmes et je file voir mon compagnon de l'époque. Je vais tout faire pour oublier - boire, fumer, faire l'amour, regarder une série, rigoler trop fort. 

 

Mais, j'ai décidé de cette fois ci, de me laisser aller. J'ai décidé de montrer à mon cerveau qu'il pouvait avoir peur, parce que rien de dangereux ne m'arrivera aujourd'hui. Alors mon cerveau remarquera qu'il s'est trompé. 

Et je sais qu'il se trompera -- je sais qu'il me rendra encore anxieuse à chaque fois que j'entendrais une porte claquer, à chaque fois que j'irais au lit, à chaque fois que je verrais des gens agressifs, à chaque fois que je verrais quelqu'un sous mauvais alcool, à chaque fois que quelqu'un m'insultera sans raison. Je sais que c'est loin, loin d'être fini.

 

Mais aujourd'hui, pour la première fois, je me suis pas dit "il faut que j'arrête d'y penser". Aujourd'hui, pour la première fois, j'ai continué de lire, même si ça me faisait souffrir dans mon inconscient. Aujourd'hui, j'ai été assez en sécurité dans ma vie émotionnellement pour pouvoir affronter ces souvenirs. Aujourd'hui, je ne me déteste pas pour ressentir ces symptômes physiques démesurés. C'est malheureux, mais j'y peux rien. Donc, aujourd'hui, je ne me blâme pas. Aujourd'hui, je vais sortir dans la rue, et rentrer chez moi, en parler tranquillement avec mon copain demain. 
Aujourd'hui, je me rends compte, pour la première fois de ma vie, que je connais ces flashs par coeur.

Aujourd'hui, pour la première fois, je regrette de ne pas me rappeler de tout. J'aurais aimé avoir une caméra dans ma chambre, pour pouvoir regarder ces moments douloureux à nouveau. Pour la première fois, j'ai vraiment envie je crois, de me rappeler précisément tout ce qu'il s'est passé.
Parce que j'ai une excellente mémoire. Mais je suis incapable de me souvenir de mon enfance. Je suis incapable de me souvenir des moments réellement traumatisants. 
Aujourd'hui, j'aimerais les revoir - voir à quel point mon père m'a fait souffrir, j'aimerais me souvenir de tous ses coups, de toutes ses insultes, de tous les moments horribles qu'il nous a fait passer, j'aimerais me souvenir de chaque assiette qu'il a brisé, j'aimerais me souvenir de la fois où il a cassé la porte (c'est quand même drôle de se réveiller un matin, savoir qu'il s'est passé quelque chose parce qu'on voit des éraflures, mais ne pas se souvenir quoi), j'aimerais me souvenir de la fois où il a fait un trou dans le mur, j'aimerais me souvenir, de tout.

Pour prouver à mon cerveau qu'il a raison de réagir comme ça. Pour lui montrer que c'est légitime d'avoir peur - la peur, c'est quand on a pas envie que quelque chose nous arrive. Donc, mon cerveau a raison d'être angoissé. Je dois juste lui apporter quotidiennement la preuve que c'est du passé. Que la fille pétrifiée, la jeune fille dépressive, c'est du passé. Je dois lui montrer, qu'à nous deux, on peut faire des merveilles. Et on va les faire. Mais, on doit se faire confiance mutuellement pour ça. Alors je fais le premier pas. 


Aujourd'hui, je dis merci à mon cerveau de m'avoir rendue hypervigilante sur des milliers de choses. Merci, parce que lorsque j'étais perdue, tu m'as envoyée étudier la psychologie (même si ma conscience n'était absolument pas convaincue). Je suis persuadée maintenant que c'était pour que je me soigne. Merci cerveau, tu as vu, quatre ans après mon inscription, j'ai eu des réponses. J'ai compris comment je marchais. Parce que toi, cerveau, tu n'as jamais voulu arrêter de vouloir comprendre. Que ça soit des situations débiles, ou des situations importantes, tu n'as jamais cessé de chercher à comprendre. Et ça, je te le dois. Même si j'ai fait chier énormément de personnes avec ce côté (mais POURQUOI TU ME REPONDS PLUS PUTAIN QU'EST CE QUE J'AI FAIIIIIIIT répétés trois cent fois par jour), ça a été extrêmement bénéfique pour moi. Merci, merci cerveau, de n'avoir jamais cédé à la méchanceté totale. Merci, cerveau, d'avoir toujours tenté, même dans les moments les plus sombres, d'apprécier les bonnes choses. Je me rappelle d'une fois, ma conscience était au plus bas, tu avais réussi à être content en regardant un oiseau se poser sur ma fenêtre. Et moi, toute déprimée et perdue entre tous ces mouchoirs, j'avais aussi trouvé ça beau. Parce que tu m'as toujours forcée à prendre soin de l'essentiel. 


Je remercie mon cerveau d'avoir voulu éviter certains stimulus, certaines ambiances. Parce que de la peur de croiser mon père à Montpellier, j'ai déménagé aux Pays-Bas, j'ai trouvé des études qui me conviennent parfaitement, j'ai retrouvé ma motivation, j'ai trouvé l'amour. Je n'ai pas encore retrouvé mon sommeil (j'ai peur de l'avoir définitivement perdu), mais j'ai trouvé plein de choses en comparaison. Tout ça parce que j'avais peur.
Donc, merci cerveau d'avoir eu peur, tu as rempli ta fonction. Maintenant, utilise cette énergie à te soigner. Et quand tu seras prêt, toi et moi, on sera imbattables. Et on aura définitivement gagné. J'ai souvent dit que je te haissais, mais je ne te comprenais pas. Je comprends, maintenant. Merci.

 

nostradamus_and_the_astrological_planet_killer

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